À l’occasion de la Journée internationale des infirmières et infirmiers du 12 mai, le Secrétariat international des infirmières et infirmiers de l’espace francophone (SIDIIEF) a alerté les décideurs par communiqué de presse sur les risques liés à la tendance actuelle visant à réduire les exigences de formation initiale des infirmières pour contrer la pénurie. Il réitère à cette occasion l’importance d’une formation universitaire solide, afin de répondre aux enjeux de santé et de complexité des soins.
Le SIDIIEF est une instance de référence internationale, qui a pour mission de mettre en réseau les infirmières et infirmiers francophones, de faciliter le partage des savoirs, de mettre en valeur le leadership infirmier et de sensibiliser les décideurs et le grand public au rôle que joue la profession dans la santé des populations.
La formation infirmière est un facteur clé pour la qualité des soins et la sécurité des patients, car soigner nécessite un jugement clinique reposant sur des connaissances de pointe. Pour cette raison, les pays s’accordent de plus en plus sur une formation universitaire comme condition d’entrée à la profession et misent également sur le déploiement de la pratique avancée.
Le miroir aux alouettes
Le contexte de pénurie mondiale d’infirmières met les systèmes de santé sous grande pression, ce qui amène les décideurs à rechercher des solutions à court terme, comme le recrutement international intensif et la mise en place de formations accélérées ou réduites. Si ces formations permettent d’amener plus rapidement du personnel sur le terrain, elles n’apporteront pas, à moyen et long terme, une réponse adéquate aux besoins de nos systèmes de santé. Diminuer les exigences et réduire la durée de formation pour faire face à la pénurie n’est pas une solution viable ni pour les patients ni pour contrer la pénurie infirmière. Hélène Salette, directrice générale du SIDIIEF rappelle à ce propos « Après des années de plaidoyer pour l’universitarisation de la formation, permettant aux infirmières de déployer les compétences essentielles pour améliorer les soins et transformer les systèmes de santé, il est choquant de constater que l’on considère encore pouvoir tronquer la formation infirmière sans conséquence pour les patients. »
Jacinthe Pepin, présidente du conseil consultatif sur la formation infirmière du SIDIIEF précise pour sa part « Écourter la formation infirmière peut, à court terme, combler un besoin quantitatif de main-d’œuvre, mais n’assure aucunement un développement durable ». En effet, si le choix de former plus vite peut sembler financièrement judicieux en regard de la pénurie, il occulte le coût du roulement de personnel et d’abandon de la profession. Moins bien formées pour répondre adéquatement à la complexité des soins, ces recrues risquent rapidement d’abandonner la profession.
Des solutions ni nouvelles, ni efficaces, ni sécuritaires
Dans sa prise de position adoptée le 19 avril 2023, le SIDIIEF observait que de nombreux pays confrontés aux mêmes difficultés liées à la pénurie d’infirmière se tournaient vers des solutions rapides et à courte vue, tel que le recrutement à l’international de personnel infirmier. Plus inquiétant, c’est maintenant une tendance lourde d’offres de cursus raccourcis de formation initiale des infirmières qui est observée dans de nombreux pays. Dans cette prise de position, le SIDIIEF s’appuie sur quelques exemples de mise en œuvre de cette solution « ni nouvelle, ni efficace, ni sécuritaire » :
- En Suisse romande, la menace d’exiger un niveau moindre de formation continue de peser ;
- En France, le projet Parcours réussite vise à raccourcir d’un an la formation qui permet aux aides-soignantes de devenir infirmières ;
- Au Québec, le nouveau programme de recrutement d’infirmières de l’international inclut l’accélération du parcours de formation de mise à niveau.
Dans un mémoire publié en 2015, « La qualité des soins et la sécurité des patients : une priorité mondiale », le SIDIIEF faisait déjà état de plusieurs études apportant la preuve que la formation infirmière est un enjeu clé de la sécurité des patients et de la qualité des soins. L’expertise de l’infirmière sauve des vies et prévient bon nombre d’événements indésirables Prenant appui sur des résultats probants selon lesquels les taux de mortalité diminuent significativement avec l’augmentation du nombre d’infirmières bachelières, le SIDIIEF soutien que l’accès à la formation universitaire devrait être soutenu, notamment pour des raisons de sécurité des patients.
Consulter la prise de position du SIDIIEF en cliquant ici.
Article rédigé par Philippe Tisserand
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